Lorsqu’on accueille un chiot, l’un des premiers conseils qu’on nous donne c’est de le socialiser. Cependant, la socialisation d’un chiot doit se faire de manière réfléchie afin d’éviter des problèmes à long terme. Je vous explique.
Quelques bases de la socialisation
Tout d’abord, il faut garder à l’esprit que “socialisation” ne veut pas dire "interaction". Il ne suffit pas de multiplier les interactions dans les premiers mois de vie de nos chiots pour qu’ils deviennent des adultes sociables et équilibrés. Le plus important sera de leur proposer des interactions positives avec des congénères bien dans leurs pattes. Ce n’est pas la quantité qui fait la différence, mais la qualité.
Il vaut mieux donc être sélectif dans les rencontres, quitte à ne pas laisser votre chiot interagir avec certains chiens. Par exemple, un adulte de grande taille qui s'approcherait trop frontalement de votre chiot ou qui le bousculerait, pourrait l’effrayer au point de lui provoquer une peur généralisée des gros chiens. De la même manière, des chiots un peu timides exposés à des chiots plus dynamiques et qui ne maîtrisent pas encore les codes de communication canine et les signaux d’arrêt, peuvent se sentir dépassés et prendre peur aux activités de groupe (c’est souvent le cas dans les écoles du chiot).
Afin de mettre votre chiot dans une situation de réussite à chaque rencontre, prenez en compte des facteurs comme son caractère (est-il réservé ou plutôt curieux ?), ses préférences (est-il plus à l’aise lors d’une rencontre individuelle ou en groupe ?) ou son niveau d’activité et arrêtez l'interaction si votre chiot présente des signaux d’inconfort.
Gardez en tête également que l’environnement de vie du chiot pendant les 8 à 12 semaines de vie sera déterminant pour son comportement futur. Ainsi, un chiot qui a été élevé dans un environnement enrichi, à côté de sa mère et de sa fratrie, avec beaucoup de contact humain et d’habituation aux stimuli divers, sera plus à l’aise lors des interactions sociales.
Au contraire, si votre chiot a connu des conditions de vie difficiles pendant cette période ou s’il n’a pas été en présence d’autres chiens, il sera sûrement en difficulté au début. Pour l’aider au mieux, ne forcez pas les interactions, allez à son rythme et positivez au maximum ses expériences sociales.
A quel moment commencer la socialisation ?
Toutes les expériences de votre chiot pendant les premières semaines de vie auront un impact sur sa sociabilité et son équilibre comportemental. D’abord ce sera sa mère qui lui apprendra les codes de communication canine et les auto-contrôles, d’où l’importance de laisser les chiots avec leur mère (ou un adulte équilibré si la mère est absente) au moins jusqu’à leurs 8 semaines (voire 10 ou 12 semaines si possible).
En parallèle, ce sera à l'éleveur, famille d’accueil, agent de refuge ou particulier, d’exposer le chiot à de stimuli variés comme des chiens de différente taille, d’autres espèces animales (chats, lapins, oiseaux), des personnes d’âges différentes, des bruits du quotidien (voiture, aspirateur…) et tout ce que le chiot pourrait rencontrer dans sa vie avec sa nouvelle famille.
Une fois arrivé chez vous, l’idéal c’est de travailler sa socialisation entre ses 8 et 16 semaines. Pendant cette période, il sera important que votre chiot puisse découvrir de nouvelles personnes, lieux, bruits, odeurs, chiens et autres animaux si possible, le tout en sécurité et en évitant de le submerger. Les expériences de socialisation doivent être entièrement positives et pourront être associées à des friandises ou à des jeux, afin de maintenir un état émotionnel positif chez le chiot.
Et si mon chiot a plus de 4 mois ?
Si pour quelque raison votre chiot n’a pas été sociabilisé correctement avant ses 16 semaines de vie, lui faire acquérir des bonnes compétences sociales sera un peu plus difficile, mais en aucun cas impossible !
Il existe de nombreuses manières de lui faire découvrir de nouvelles situations sans le mettre en difficulté. Par exemple, vous pouvez lui présenter des amis ou des voisins qui lui proposeront une friandise ou un jouet, le laisser explorer votre maison et votre jardin tranquillement, puis l’introduire progressivement à l’extérieur et l'exposer à différents bruits, odeurs et images, tout en créant des associations positives. Pensez aussi au départ à lui présenter des chiens qui sauront reconnaître ses signaux d’inconfort et lui donner de l’espace.
La clé de la réussite est d’aller progressivement et de ne jamais forcer le chiot. Surtout, soyez patient et ne placez pas des attentes démesurées sur lui. Rappelez-vous que chacun fait comme il peut et que votre chiot aura besoin de votre compréhension plus qu’autre chose.
A quoi socialiser mon chiot ?
Votre chiot devrait être habitué à un maximum de stimuli, notamment :
Personnes – de sexes, d'âges, et de tailles variés, surtout les personnes âgées (qui peuvent avoir une canne ou un déambulateur), les personnes handicapées (qui peuvent être en fauteuil roulant), les enfants de toute âge, les personnes portant des sacs de courses, les facteurs, les cyclistes, les joggeurs, etc. Vous pouvez choisir d’apprendre à votre chiot à interagir avec certaines personnes dans le calme et sans sauter, ou tout simplement à les ignorer.
Animaux – d'âges et d'espèces variés, spécialement les chiens (de différentes tailles, couleurs et races), les chats (s'ils sont à l'aise avec les chiens), les autres chiots, les lapins, les poules – ou tout autre animal qui fera partie de sa vie ou qu'il pourra rencontrer. Comme pour les gens, vous pourrez récompenser soit les interactions dans le calme, soit l’absence d’interaction.
Lieux et environnements – ceci inclut les différentes pièces de la maison, le jardin, la voiture, les routes calmes et fréquentées, les bars ou restaurants (si les chiens y sont autorisés), les gares, les trains, les arrêts de bus, le cabinet vétérinaire, ou tout autre environnement que votre chien pourrait rencontrer à l'avenir. Ces endroits devront être associés à des jeux ou des friandises pour que votre chiot puisse créer des associations positives. Il devra également être exposé aux bruits du quotidien, comme l’aspirateur, la machine à laver, la sonnette de la porte, etc. Vous pouvez choisir de le récompenser quand il arrive à les ignorer par exemple.
Bruits - il s’agit des bruits auxquels il sera exposé au quotidien : les appareils électroménagers, les voitures, les sirènes des ambulances, les cris des enfants, les avions, etc. Pour aider votre chiot à s’habituer à ces bruits -ou pour le désensibiliser s’il en a pris peur- vous pouvez profiter des moments de repas ou de jeux à la maison et introduire doucement ces bruits, par exemple en jouant des audios sur votre téléphone et augmenter l’intensité peu à peu. Vous pouvez également profiter des promenades pour travailler les associations positives aux bruits de la ville. Par exemple, si vous passez devant une école, vous pouvez le récompenser quand il reste calme devant des enfants qui jouent.
Les autres apprentissages nécessaires pour son bien-être
En plus de l’habituation aux stimuli mentionnés ci-haut, votre chiot devra acquérir d’autres apprentissages importants :
La solitude - les chiots ont besoin des interactions régulières avec leurs humains. Cependant, il est important que votre chiot apprenne à rester seul pendant de courtes périodes de temps (ne laissez jamais votre chiot ou chien adulte seul toute la journée). Vous pouvez le placer dans une autre pièce de la maison ou utiliser une barrière pour bébé pour le séparer de vous au moins une fois par jour et associer cette séparation à une expérience positive : manger son repas, mâchouiller un jouet, chercher une friandise, etc. Au départ, votre chiot devrait toujours pouvoir vous voir pour être rassuré. N'oubliez pas qu’il a subi beaucoup de changements dès sa naissance à son arrivée à votre foyer et qu’il devra être perturbé le moins possible.
Les manipulations - pour beaucoup, les visites chez le vétérinaire sont souvent un problème. Beaucoup de personnes renoncent même à s’y rendre car leur chien a trop peur ou peut devenir agressif. On retrouve donc des chiens qui ne sont plus à jour de leurs vaccins ou qui ne sont pas soignés et cela a des conséquences catastrophiques pour leur santé. Pour éviter ce type de problème, il est nécessaire d’habituer le chiot depuis son plus jeune âge aux manipulations. Vous pouvez donc commencer par toucher ses coussinets, son visage, sa bouche ou ses oreilles et avancer progressivement pour introduire le brossage des dents, le toilettage, le nettoyage des oreilles et des yeux, simuler de mettre un pansement, etc. Cet apprentissage doit se faire à l’aide des récompenses et dans le calme. Il est important que votre chiot reste détendu dans ce type de situation, pensez donc à arrêter les manipulations s’il commence à montrer de l’excitation.
L’inhibition de la morsure - les chiots explorent le monde avec leur bouche, ils chercheront à mettre tout en bouche et à mordiller pendant les contacts sociaux et les jeux. Durant leurs 8 à 12 premières semaines de vie, ils apprendront à inhiber leur morsure lors des jeux avec leur fratrie ou leur mère : quand un chiot couine parce qu’il a été mordu trop fort, le jeu s’arrête ! Pour être complètement acquis, cet apprentissage devra être continué à la maison. Ne permettez pas à votre chiot de vous mordiller les mains ou les pieds, même si cela vous paraît mignon (cela fera très mal quand il aura ses dents définitives et sera à sa taille adulte). Si votre chiot vous mordille pendant une séance de jeux ou de câlins, arrêtez immédiatement l'interaction. En revanche, récompensez votre chiot dès qu’il arrive à rester calme ou à rediriger les mordillements vers un jouet par exemple.
Le partage de ressources - la protection des ressources est une réponse naturelle pour la plupart des chiots, car ils se trouvent souvent en “concurrence” avec leur fratrie. Cependant, une fois dans sa nouvelle famille, le chiot devra apprendre à accepter la présence des humains ou d’autres animaux à côté de ses ressources : jouets, panier, nourriture, etc. Vous devriez être en mesure de pouvoir passer à côté de sa gamelle pendant le repas ou de lui retirer un objet dangereux par exemple, sans avoir de réaction négative. Pour cela, il est important de travailler les associations positives : jetez des friandises dans sa gamelle quand il est en train de manger et approchez vous petit à petit jusqu’à être capable de placer votre main dans la gamelle pour y mettre les friandises, ou proposez-lui d’échanger un objet par un autre (par exemple, une peluche par un jouet à mâcher), jusqu’à ce qu’il accepte de vous donner l’objet sur simple demande.
Pour résumer
La socialisation de votre chiot est un processus qui peut prendre plus ou moins longtemps selon son caractère et ses expériences passées. Rappelez-vous que la meilleure manière de réussir est d’aller progressivement, dans le calme et de garder des attentes réalistes. Lors de son apprentissage, placez des objectifs atteignables et offrez-lui un cadre positif. Ne mettez jamais votre chiot en situation d’échec, permettez-lui de réussir à chaque fois et récompensez-le systématiquement.
Finalement, n’oubliez pas que la socialisation s’entretient tout au long de la vie du chien, il sera donc important de continuer à renforcer les bons comportements.
Et si vous avez besoin d’aide pour aller plus loin, n’hésitez pas à faire appel à un professionnel !